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» Jan 2010 | ? مشَارَ?اتْي » 5,219 | ?
نُقآطِيْ
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Sachant que Bella prévoyait de rendre une petite visite à Jacob le samedi en mon absence, j’avais préféré avancer mon départ d’une journée. Je voulais être rentré au plus tôt et m’assurer qu’elle n’aurait pas l’occasion de le rencontrer. Je ne m’imaginais pas qu’elle puisse réussir à contourner la vigilance de ma sœur. Esmée avait d’ailleurs tout arrangé avec Charlie et Alice devait suivre Bella comme un vrai garde du corps. Je n’avais donc aucun souci à me faire et cela me donnait suffisamment de courage pour la quitter deux longs jours et une seule interminable nuit. Je ne pouvais pas endurer plus. J’appréciais trop de la voir dormir pour ne pas assister à ce délicieux spectacle deux nuits de suite.
Jasper et Emmett partirent donc vers le sud en direction de la Caroline du Nord alors que Carlisle et moi nous dirigions vers le nord. J’avais placé tant d’espoir dans cette visite que j’avais du mal à contenir mon euphorie. J’avais conseillé à mon père de nous nourrir avant notre arrivée car les ours étaient protégés en baie d’Hudson et il était très difficile de s’y nourrir. Je ne lui avais pas raconté l’épisode des phoques mais cela restait un épisode très humiliant pour moi.
Nous nous arrêtâmes donc aux portes du Manitoba. Une fois engouffrés sur ces terres froides et gelées, je savais qu’il serait particulièrement difficile de trouver une espèce non protégée. Il faisait nettement moins froid que lors de ma précédente visite mais malgré tout, le thermomètre devait frôler zéro degré. Il ne neigeait plus et le dégel débutait timidement. Nous fîmes donc escale dans le parc national du Prince Albert. Le parc était magnifique. Revoir toute cette splendeur me permettait de m’évader et d’oublier temporairement mes sources de contrariété. Carlisle et moi avions débusqué un immense troupeau de bisons des plaines ce qui nous fit un délicieux repas. J’avais repris des forces et surtout mes horribles cernes violacées avaient enfin disparu. Je me sentais bien, voire heureux de retrouver mon amie.
J’espérais qu’elle se souviendrait de moi et qu’elle me pardonnerait de ne lui avoir jamais donné de nouvelles. Plus nous nous avancions, plus je sentais une boule d’angoisse obstruer ma gorge. J’attendais tellement de cette rencontre que je craignais qu’elle soit absente ou ne daigne me recevoir. Je reconnaissais par endroit des indices qui me confirmaient que j’étais bien sur le chemin que j’avais jadis emprunté. Le paysage restait identique à celui de mes souvenirs. Je pouvais remercier ma mémoire photographique car je crois que je n’y serais jamais parvenu sans cela. Carlisle percevait mon agitation et ma peur que cette rencontre soit un échec. Il savait que j’y plaçais beaucoup d’espoir pour notre avenir à Bella et à moi-même.
Je commençais même à douter et à me dire que venir n’était pas une si bonne idée et que je devrais vite retourner auprès de ma bien-aimée. Mes yeux aperçurent enfin le petit chalet perdu au milieu de nulle part, mettant un terme à mes tergiversations. Là, je fus un peu déçu car je ne percevais pas ses pensées. Carol n’était pas là mais quelqu’un d’autre y était et étrangement cette personne semblait nous attendre. Ses pensées se mélangèrent aux miennes afin de me rassurer et de m’inviter à m’approcher sans crainte.
Je frappai donc à la porte, suivi par Carlisle. Aussitôt elle s’ouvrit et j’aperçus un vieil homme devant moi. Il me souriait, très heureux de me voir et nullement surpris de découvrir notre peau aussi blanche que la neige autour de nous. La sienne était tannée par les années et l’excès de soleil. Il avait de longs cheveux noirs clairsemés de mèches blanches qui lui tombaient sur les épaules. Ses yeux d’un vert émeraude étincelant me rappelaient ceux de Carol. Il était habillé d’une blouse en peau de bête qui lui tombait jusqu’aux chevilles. J’avais l’impression d’avoir un chef de tribu devant moi. Il nous fit signe d’entrer et s’exclama :
- Nous t’attendions Edward. Sois le bienvenu. Je suis Patte d'Ours, le grand-père de Petite Ourse … ou Carol, si tu préfères.
- Enchanté ! lui répondis-je étonné.
J’étais surpris de le voir car Carol m’avait dit qu’il était tout le temps dans sa réserve près de Québec et qu’il ne venait jamais lui rendre visite. Il avait du se passer quelque chose de grave et aussitôt un frisson me parcourut. Il le remarqua tout de suite :
- Ne t’inquiète pas ! Elle va bien, me rassura-t-il.
Il pouvait donc lire mes pensées ! Impressionnant mais guère surprenant car Carol m’avait expliqué que son grand père était un puissant chaman.
- Tu peux aller la rejoindre si tu le souhaites. Elle a dû porter secours à un bébé ours. Elle n’est pas très loin. Je pense que tu pourras la trouver facilement.
- Je vais aller l’aider… répondis-je aussitôt. Mais avant, permettez-moi de vous présenter mon père, Carlisle. Nous sommes venus tous les deux car nous avions besoin de l’aide de Carol pour clarifier certaines choses …
- Va la rejoindre … me coupa-t-il, ton père va m’expliquer votre requête.
- Très bien, acceptai-je après avoir interrogé Carlisle du regard pour être sûr qu’il n’y voyait pas d’inconvénient.
Ils allèrent donc s’installer sur le canapé pour entamer leur conversation alors que je me dirigeais vers la ville à la recherche de Carol. La nuit commençait à tomber lorsque je pus enfin capter ses pensées. Elle était assez loin, dans la baie. Un petit ours s’était coincé la patte dans un piège … L’endroit était particulièrement dangereux car les températures en légère hausse avaient fragilisé la glace et la rendaient moins résistante. On l’entendait craquer fortement. Je m’approchais avec prudence de Carol, d’une part pour ne pas fissurer la glace et la mettre en danger et d’autre part pour ne pas effrayer encore plus ce petit animal. Il se débattait sous l’effet de la douleur. Sa mère nous observait à bonne distance et cela ne me rassurait pas. Carol ne m’avait pas entendu arriver, trop occupée à délivrer l’ours. Malheureusement, elle n’avait pas assez de force pour lui ôter la patte de cet étau de fer. Pour ne pas l’effrayer par mon arrivée, j’allais tenter une expérience pour le moins nouvelle. Je connaissais la télépathie pour l’utiliser quotidiennement avec Alice mais je n’avais jamais essayé de la provoquer avec une tierce personne.
Je savais que Carol avait des ressources et des talents insoupçonnés me laissant penser que ma tentative pourrait fonctionner. Je voulais prévenir mon amie, de mon arrivée par la pensée et ce, afin de ne pas rendre la situation plus périlleuse. Je me concentrai quelques secondes en me focalisant sur Carol pour lui adresser le message suivant :
Ne te retourne pas. Je viens t’aider …
Elle l'avait bien reçu et me répondit de la même manière :
Comme toujours, tu arrives au bon moment !
Elle se retourna dans ma direction, le sourire aux lèvres.
Je vois que tu as encore un nouveau don ! lui répondis-je en m’installant doucement à côté d’elle.
Elle me fit signe afin que j’ouvre le piège pendant qu’elle enlèverait la patte de l’ourson emprisonnée dans l’étau. Une fois libéré, ce dernier boitilla en direction de sa mère et ils repartirent doucement se cacher dans la toundra. Carol souriait face à cette scène attendrissante et j’en profitai pour la regarder. Elle n’avait pas changé, toujours le même sourire lumineux, les cheveux noirs attachés en une longue queue de cheval et le corps camouflé sous une énorme doudoune. Elle se tourna alors vers moi et nos regards se croisèrent. Je compris aussitôt que la joie que j’éprouvais était réciproque.
- Ne va pas croire que je vis toujours des situations aussi dangereuses ! A croire que tu le fais exprès pour que j’ai besoin de toi … s’exclama-t-elle de son charmant accent québécois. - Non. J'aime à croire que tu t'en serais sortie toute seule … dis-je en souriant. - Cela devient trop fréquent ces temps-ci à cause de ces maudits braconniers. Ils savent que les ours ont fini d'hiberner et sortent pour se nourrir avec leur famille. Ils installent ces pièges pour les capturer et les vendre. C’est un marché répugnant … s'énerva-t-elle.
- Je connaissais le massacre des phoques mais j'ignorais que l'on s'en prenait aussi aux ours ! m'étonnai-je.
- C'est récent car le marché asiatique devient de plus en plus gourmand et leurs ignobles fermes d'élevage ne leur suffisent plus. Ils s'attaquent maintenant aux ours en liberté et protégés de surcroît. En Asie, la bile ainsi que la vésicule biliaire ont des vertus thérapeutiques pour traiter différentes inflammations. Voilà pourquoi maintenant, ils s'en prennent à mes ours !!
- Enfin, tu n'es pas venu pour cela …. reprit-elle. Je suis heureuse que tu te sois enfin décidé à venir me voir ! lâcha-t-elle en se relevant et se dirigeant prudemment vers la terre ferme.
- Je regrette de ne pas t’avoir donné de nouvelles avant mais il s'est passé tant de choses … Je ne suis pas excusable…
- D'ailleurs, je ne sais pas si je dois me fâcher ou être soulagée de te revoir !! dit-elle en me regardant intensément une nouvelle fois et en me faisant part de ses pensées.
Elle me retraça tout ce que j'avais vécu après mon passage à Churchill. Elle avait vécu à distance tout ce qui m'était arrivé … ma tentative de traque contre Victoria, le nouveau-né qui m'avait exilé au Brésil puis l'annonce de la mort de Bella et mon périple en Italie. Je sentais ses traits s'attrister. Elle me faisait partager sa colère et sa frustration de ne pas avoir pu m'aider. Elle avait été une spectatrice involontaire de tous mes déboires. J'étais stupéfait … je n'avais jamais quitté son esprit, un peu comme si nous étions connectés.
- Comment est-ce possible ? bredouillai-je sous le choc de cette découverte.
- Tu n'es pas le seul à avoir été changé par ce qui s'est passé dans la hutte … Quand je disais que tu étais l'un des nôtres, je ne pensais pas si bien dire … Je n'arrive pas encore vraiment à me l'expliquer mais cette expérience nous aurait liés, en quelque sorte. Je partage tous les plus grands moments de ta vie à travers tes pensées. Il faut croire que ma mission est de te protéger même si j'ai cru te perdre quand tu as décidé d'aller te livrer chez ses monstres Italiens … Mais qu'avais-tu en tête ? Je pensais que tu avais compris l'importance que tu avais sur cette terre ? me demanda-t-elle d'une voix mêlée de tristesse et d'incompréhension. - Je t'ai faite souffrir … toi aussi … murmurai-je anéanti. Moi qui te pensais heureuse, je t'ai rendu la vie insupportable. Jamais je n'aurais pensé une telle chose. J'avais réagi ainsi car j'étais au bord du gouffre et j'étais persuadé à l'époque que plus rien ne me retenait ici bas. Je m'étais doublement trompé … m'exclamai-je furieux, les poings serrés.
- Je commence à comprendre pourquoi nos chemins se sont croisés … Tu as besoin de conseils et aujourd'hui encore car tu te comportes comme un vrai imbécile avec elle et avec les Quileute !! me gronda-t-elle après avoir repris un peu d'assurance, une fois sur la terre ferme. - Je sais. N'en rajoute pas, s'il te plait … C'est pour ça que je suis venu te voir car je suis totalement perdu. J'ai constamment peur pour elle mais leur amitié est si importante pour eux deux. J'ai conscience que je ne suis pas honnête mais je n'arrive pas à me maîtriser …
- Tu as peur de quoi au juste ? Ils sont si féroces que cela ?? se moqua-t-elle.
- C'est Jacob, le problème. Il ne se maîtrise pas lorsqu'il doit se … - Transformer en loup !! Est-ce vraiment cela le problème ?? Même s'il est jeune, cette mutation est tellement ancienne dans cette meute que les garçons sont très vite pris en main par leurs aînés. Il ne lui fera jamais de mal … Au fond de toi, tu le sais. Ce n'est pas cela le problème !! m'assura-t-elle.
- Ah bon et c'est quoi alors …
-T'es tu déjà mis à la place de Bella ?
- C'est à dire ? lui demandai-je surpris.
- Que ferais-tu si j'étais Jacob et que l'on nous empêchait de nous voir ??? Comment réagirais-tu ?
- Ce n'est pas pareil. Tu ne risques pas te me faire du mal …
- Mais Jacob non plus !!
Cette conversation avait un désagréable goût de déjà vu mais la différence cette fois était que Carol n'avait rien à gagner à prendre le parti de Jacob. Je commençais à comprendre ma méprise et mes torts.
- Pourquoi, cet air si dur ? me demanda-t-elle en attrapant mes poings et en les enveloppant de ses mains tièdes et douces.
- Je sais que tu as raison mais c'est plus fort que moi… Le besoin de la surprotéger est ancré en moi. Je crois que je viens de me rendre compte que j'avais dépassé les bornes et que Bella tentait désespérément de me le faire comprendre et je ne l'ai pas écouté. - Il n'est jamais trop tard pour bien faire ! me dit-elle en me souriant. Je ne répondis pas, réalisant que j'étais véritablement un idiot et que j'avais failli perdre Bella à cause de cela.
-Au fait, je ne t'ai pas remercié … reprit-elle joyeuse.
- J'ai été démasqué ! répondis-je en souriant, à mon tour. Pouvant lire mes pensées, elle avait aussi découvert que j'étais à l'origine de son maintien ici pour plus de trois ans.
- Je ne sais pas comment tu as fait mais c'est un vrai cadeau. Je suis heureuse de pouvoir rester ici aux services des animaux.
- C'était le moins que je puisse faire ! Nous reprîmes notre marche, main dans la main, en direction du chalet où nous attendaient son grand-père et Carlisle.
- Tu as bien fait de venir car depuis plusieurs jours, je fais le même cauchemar te concernant. Il va se passer quelque chose. C’est la raison pour laquelle j'ai demandé à mon grand-père de venir m'aider car nous ne serons pas trop de deux pour tenter de trouver de quoi il s’agit.
- De quoi parlait ce rêve ? lui demandai-je inquiet.
- C'est très flou. Ce ne sont pas des images très précises. C'est pourquoi mon grand-père doit intervenir pour m'aider. Nous avons besoin d'une vision commune pour comprendre … mais je ne veux rien dire avant d'en être sûre.
Moi qui étais venu régler mon incompréhension vis à vis des Quileute voilà qu'à présent, il s'agissait d'un prochain malheur. N'en finirait-on jamais ??
- Je suis désolé de te mêler à tout cela … m'excusai-je.
- Tu plaisantes, j'espère !! s'exclama-t-elle. Tu m'offres tant d'occasions de dépasser mes limites et je n'aurais jamais fait toutes ces découvertes. Grâce à toi, je progresse à une vitesse phénoménale. Tu as changé ma vie et c'est peu dire … Je ne remercierai jamais assez les esprits de t'avoir guidé vers moi. Ne t'excuse de rien si ce n'est de réagir comme un idiot par moment … me taquina-t-elle.
- Je te remercie d'être mon amie. Tu m'apportes tant de choses …
- Allez, allez… on arrête ça … à nous de ne jamais oublier que l'on peut compter l'un sur l'autre. C'est tout ce qu'il y a à retenir … Compris ? conclut-elle pour ne pas manifester son émotion.
- Compris !! lui confirmai-je en resserrant sa main dans la mienne.
Je sentais déjà sa présence apaisante m'envelopper comme si tout devenait plus clair. Elle savait toujours aussi bien me parler et me mettre à l'aise. Pourquoi avais-je tant tardé avant de venir la voir ?? Cela m'aurait évité de souffrir inutilement pendant aussi longtemps. Nous étions déjà devant chez elle. Nous entrâmes, pensant retrouver mon père et Patte d'ours à l'endroit où je les avais laissés … mais ils n'étaient plus là. Carol remarqua mon étonnement :
- Ne t'inquiète pas, mon grand-père l'a emmené dans la hutte … Ils étaient trop pressés pour nous attendre. Attends-moi deux minutes, je dois me changer.
En attendant qu'elle se prépare, j'eus soudainement envie de savoir si tout se passait bien à Forks. Savoir si Alice s'en sortait dans sa tentative d'enlèvement. Qu'elle ne fut pas ma surprise en entendant la voix de Bella, visiblement irritée, en consultant ma boite vocale :
Tu as des ennuis mon pote. De gros ennuis. Les grizzlis enragés te paraîtront adorables quand tu verras ce qui t'attend à ton retour.
Comme je le craignais, elle me reprochait ma réaction excessive et l'isolement que je lui imposais. Et au lieu de m'inquiéter, ce message me fit sourire, d'une part, car il n'y avait aucun grizzli à l'horizon et d'autre part, parce que je savais déjà comment me faire pardonner … Ce fut Carol qui vint interrompre mes pensées. Elle avait revêtue sa robe de cérémonie. Elle était ravissante, identique à mes souvenirs. Nous nous mîmes en marche vers la hutte, celle qui m'avait révélé au monde. C'était étrange de revenir ici après avoir découvert toutes ces choses que je n'aurais jamais dû savoir ou revivre. Je songeais à ma mère et à mon passé principalement. Avoir eu accès à tout cela, était un tel cadeau que j'avais du mal à croire que Carol ou son grand-père puissent encore me révéler de nouvelles informations. Ils recelaient de tels pouvoirs qu’il mettait difficile de croire que tout cela puisse avoir un sens. Le mystique faisait bien partie de ce monde et il fallait s’en accommoder alors tout ce qui pouvait me permettre de protéger Bella et les miens, était le bienvenu même si cela n’avait rien de rationnel.
Mon père était déjà installé auprès de Patte d’Ours. Ils étaient assis autour du feu qui répandait un léger halo de lumière sous la tente. Carlisle était émerveillé par tout ce que lui avait révélé l’indien et il était tout aussi curieux que moi de découvrir ce qu’ils nous préparaient. Une fois Carol et moi-même, assis auprès d’eux, le vieil homme nous expliqua ce qui allait se produire. Il tenait entre ses mains, un tambour. Ce dernier allait être son outil pour faire appel à la magie et aux esprits afin de les guider vers lui. Il l’avait fabriqué lui-même avec le bois d’un arbre que les esprits lui avaient indiqué et la peau était celle d’une chèvre de sa tribu. Il était minutieusement décoré de plusieurs pattes d’ours symbolisant son prénom.
- Nous voilà réunis afin de t’aider, Edward, à maintenir un équilibre entre ta famille et la meute des Quileute. Je perçois des tensions qui envahissent tout ton être. Les esprits ont même prévenu Carol au travers de mauvais rêves. Je vais les invoquer afin de rétablir l’ordre des choses et de percer la signification de ses cauchemars. Ce fut ses dernières paroles car ensuite, il se mua dans un silence empreint d’une profonde concentration. Nous pouvions entendre les battements de son cœur, doux et posés. Il se mit ensuite à frapper sur son tambour de sorte que ces deux rythmes battaient à l’unisson. Son cœur et son instrument ne faisaient alors plus qu’un. Carol me prit la main et me demanda de faire de même avec celle de mon père. Elle ferma les yeux et se mit à fredonner des chants indiens. La mélodie était guidée par les battements du tambour. Je sentais la main de Carol brûler dans la mienne. Une puissante énergie se dégageait d’elle. Elle se mit à chanter plus fort et les battements du tambour s’accélérèrent. C’est alors que le feu se fit plus puissant, si incandescent qu’il éclairait totalement la tente. Un nuage de fumée blanche se forma au-dessus de nous. Les roulements de tambour étaient assourdissants recouvrant la voix de Carol. Je sentis brusquement une énorme décharge électrique transpercer mon corps de part en part pour ensuite envahir Carlisle à son tour. Je compris que les esprits se manifestaient et qu’ils nous invitaient tous à les écouter. Les yeux de Patte d’Ours se révulsèrent et une voix d’autre tombe se mit à parler :
Le danger arrive. Oubliez vos querelles et préparez vous à lutter contre un puissant ennemi.
Des images apparurent à travers la fumée qui se dispersait doucement. On pouvait y voir ma famille et les Quileute, non pas en train de se battre les uns contre les autres mais unis. Les loups étaient à nos côtés … pour protéger Bella. Bella était meurtrie, spectatrice impuissante de ce terrible combat. Je sentais une tension s’emparer de moi comme si je ressentais le mal qui s’annonçait. Je supportais très mal de voir Bella si vulnérable. Elle était la raison de notre rapprochement mais aussi celle de la venue du courroux qui s’annonçait. Malheureusement, cet ennemi n’avait pas de visage. Les esprits ne parvenaient pas, eux-mêmes, à déceler d’où venait le danger. Nous pouvions juste voir qu’ils étaient nombreux et visiblement assez forts pour qu’aboutisse une union entre les Quileute et nous-mêmes.
J’avais du mal à y croire. Nos ennemis jurés et nous-mêmes allions devoir unir nos forces pour lutter contre un redoutable adversaire. Je n’osais même pas envisager que les esprits puissent se tromper ou m’induire en erreur. J’avais eu trop de preuves de la véracité de leurs visions pour en douter maintenant. Pourtant, j’étais mal à l’aise car même si cela paraissait inéluctable ce rapprochement me déplaisait. J’avais le sentiment de trahir ce que j’étais. J’avais besoin de digérer cette nouvelle, tout simplement.
D’un coup, le nuage se dissipa et le tambour s’arrêta brutalement. Patte d’ours était encore dans son monde mais revenait doucement à lui. Carol était plus marquée et visiblement épuisée. Elle avait puisée beaucoup d’énergie pour assister son grand-père. Carlisle lui, restait immobile, stupéfait de ce qu’il venait de vivre. Il me dévisageait pour scruter mes réactions. Il percevait mon malaise mais ne le partageait pas cependant. Pour lui, cette vision était une suite logique et se réjouissait déjà de la prochaine entraide entre nos deux espèces. Il espérait déjà que cette nouvelle alliance pourrait peut être faire oublier définitivement l’existence du traité. Bref, il voyait les choses tout à fait différemment maintenant. Comme toujours, il incarnait la sagesse et moi, les doutes et les craintes. Il avait toujours été mon contrepoids et cette fois encore, il allait devoir m’aider car je ne partageais pas du tout sa joie évidente.
J’étais prêt à faire des efforts et je me préparais à laisser Bella renouer son amitié avec Jacob. J’avançais déjà d’un pas en avant … mais là, cette nouvelle m’imposait d’en faire au moins dix et je ne m’en sentais pas capable. Pourtant, j’avais conscience qu’il le faudrait pour la survie de Bella qui allait devoir encore braver la mort. Patte d’Ours était satisfait il avait obtenu la réponse qu’il attendait. Carol était partagée entre soulagement et angoisse. Soulagée de comprendre la signification de ses rêves mais inquiète pour mon avenir. Les esprits n’ayant pas révélé qui sortirait vainqueur du combat. Elle envisageait déjà le pire. Elle savait pourtant l’étendue de ma force et les pouvoirs des Quileute mais malgré tout, elle restait sur ses gardes. Elle avait raison d’ailleurs, tout comme moi car je n’avais aucune idée de qui serait notre agresseur.
Les seuls suffisamment dangereux et nombreux étaient les Volturi. Pourquoi viendraient-ils si tôt ? J’étais persuadé que la transformation de Bella n’était pas leur priorité alors pourquoi se déplaceraient-ils ? Beaucoup de questions restaient donc en suspens mais j’avais le sentiment que je ne tarderais pas à avoir toutes les réponses. Carol était épuisée. Je me proposais de la raccompagner au chalet pour qu’elle puisse se reposer. Mon père et Patte d’Ours souhaitaient rester dans la hutte encore quelques temps, sans doute pour mieux décrypter ce que l’on venait de découvrir. Elle avait du mal à marcher et traînait les pieds. Elle ne se plaignait pas mais je savais qu’elle était à bout de force.
- Souhaites-tu que je te porte ? lui murmurai-je doucement pour mettre fin à son supplice.
- Non. Ca ira … bredouilla-t-elle.
- Carol, s’il te plaît … Tu ne tiens pas debout.
Elle hocha alors la tête pour me dire qu’elle acceptait tout de même. Je la pris dans mes bras afin de l’amener rapidement chez elle, au chaud. Elle s’était machinalement lovée contre mon torse. Carol m’appréciait bien plus qu’elle n’osait me le dire mais je savais qu’elle n’entraverait jamais mon amour pour Bella. Elle partageait mes pensées et connaissait tout ce que Bella représentait pour moi. Toutefois, elle ne parvenait à refreiner ce qu’elle ressentait et je ne pouvais pas lui en vouloir mais je ne devais pas lui faire miroiter quoique ce soit pour autant.
J’avais déjà rendu Tania malheureuse par le passé en agissant de la même manière donc aucune ambiguïté ne devait subsister. Mon cœur n’en aimait qu’une, celle que j’attendais depuis plus de cent ans. Carol était et resterait toujours une amie et son amitié était trop précieuse pour la gâcher. Je la déposai doucement sur son lit mais ses mains s’agrippèrent à mon cou. Ses yeux se plongèrent dans les miens. Elle ne voulait pas me laisser partir de peur de ne plus jamais me revoir. Elle savait que mon destin était plus que jamais lié à celui de Bella et que je me risquerais plus à la laisser seule pour venir lui rendre visite. Je lui pris les mains et les gardais quelques instants dans les miennes. Je les embrassai l’une après l’autre pour les déposer délicatement sur son ventre.
- Je sais. Ce sera difficile pour moi aussi mais ce que tu espères ne se produira pas. Je l’aime de tout mon être. Je serai toujours là pour toi. C’est tout ce que je peux t’offrir … lui murmurai-je en lui caressant la joue. - Excuse-moi… mais ce que je ressens est si fort qu’il m’est difficile de te le cacher.
- Nous vivons une relation si particulière. Elle nous apporte énormément alors conservons là telle qu’elle est. Ne changeons rien. Je ne veux pas perdre … ton amitié.
- Nous sommes liés, souviens toi … quoiqu’il puisse se passer, je serai près de toi. Et prends garde à ce danger qui plane. Je ne voudrais pas qu’il t’arrive malheur.
- Je vais devoir rentrer. Je ne peux pas rester plus longtemps. Je ne te dis pas quand je reviendrai car tu le sauras avant moi ! la taquinai-je pour tenter de la faire sourire.- Je suis heureuse de t’avoir vu et n’hésite pas à revenir me voir, dit-elle comme si elle me suppliait.
- Repose-toi, tu es exténuée … lui proposai-je pour mettre un terme à cette conversation difficile.
C’était douloureux de lui faire de la peine mais je ne pouvais pas lui donner ce qu’elle voulait. J’espérais qu’avec le temps, elle me verrait vraiment comme un ami et rien de plus. Je lui déposai un léger baiser sur le front et sortis rapidement du chalet pour rejoindre Carlisle et le grand-père de Carol. Nous le remerciâmes de son aide et l’informâmes que nous allions reconsidérer notre opinion concernant les Quileute. Il me rassura aussi sur le fait que Carol allait s’en remettre car elle était tout à fait consciente de la situation. En d’autres termes, la fatigue avait laissé parler ses sentiments mais qu’elle les refoulerait de nouveau dès son réveil.
Ce passage à Churchill était une bonne idée même s’il avait été éprouvant sur certains aspects. J’avais obtenu ce que je voulais et même plus. Durant tout le trajet du retour, Carlisle n’eut de cesse de parler, de s’extasier sur ce que nous venions de vivre. Bien évidemment, il avait conscience que nous devions encore garder cette théorie pour nous afin de ne pas alarmer toute la famille. Nous allions surveiller les jours à venir et prendre les dispositions nécessaires en temps utile. Mes pensées vagabondaient déjà vers Bella. J’étais si pressé de la rejoindre. Elle m’avait tant manqué. J’étais pressé de lui annoncer que j’avais enfin changé d’avis et que j’étais prêt à l’écouter. En arrivant à la maison, je remarquai que tout était calme.
Carlisle s’empressa de rejoindre Esmé qui survolait un livre tout en guettant le retour de son mari. Elle fut enfin soulagée de le voir arriver. Rosalie tentait, quant elle, de s’occuper en regardant la télé. Emmett n’était pas encore rentré et elle ressassait la conversation qu’elle avait eue la veille avec Bella. Ma sœur en était encore contrariée vu la frénésie avec laquelle elle changeait de chaînes, comme si aucun programme ne captait son intérêt. Elle avait expliqué à ma bien-aimée les raisons de son attitude hostile envers elle. Elle avait surtout tenté de la faire réfléchir sur son envie de devenir l’une des nôtres. Rosalie avait insisté sur le caractère irrémédiable de notre état et surtout sur les choses qu’elle n’aurait jamais. Je connaissais le plus gros regret de ma sœur, celui de ne jamais pouvoir avoir d’enfant. Bella, elle, le pouvait encore et elle s’en moquait puisqu’elle préférait mourir. Rosalie ne comprenait pas que Bella ne soit pas plus abattue par ce sacrifice …
Subitement je redoutais que ma sœur ait réussi à la faire changer d’avis. Je m’étais enfin préparé à cette idée et voilà que Rosalie tentait une fois encore de s’interposer. Je voulais que Bella soit près de moi pour toujours … mais elle pouvait encore changer d’avis. Elle n’avait d’ailleurs pas encore accepté d’être ma femme alors rien n’était encore tout à fait sûr. Je devais plutôt m’en réjouir car c’était toujours ce que j’avais souhaité : que Bella reste vivante le plus longtemps possible. Alors pourquoi doutais-je ?? L’approche de ce grand danger devait y être pour quelque chose. J’avais sans doute besoin d’être rassuré. Savoir qu’elle consentirait à être ma femme, me comblerait de bonheur. Ce fut Alice qui mit fin à mes interrogations. Elle s’approcha de moi en me tendant la clé de la Porsche que je venais de lui offrir. Elle était abattue.
- Tu peux la reprendre. J’ai failli à ma mission… bouda-t-elle.
- Dois-je en conclure que Bella a réussi à tromper ta vigilance ? lui demandai-je surpris. - Oui, Jacob Black est venu la chercher au lycée … Je n’ai rien pu faire. Il y avait trop de monde. Elle est rentrée en fin d’après midi, toute seule et à moto en plus ! Elle dort maintenant, m’expliqua-t-elle sensiblement agacée.
- Je ne t’en veux pas Alice … Je te l’ai offerte, elle est à toi. C’est moi qui te dois des excuses. Je me suis laissé emporter et je n’avais pas à t’imposer cela. J’ai réagi comme un idiot. - Et bien Edward, quelle sollicitude tout à coup ! Où sont passées ton angoisse et ta haine contre ce loup ?? me demanda-t-elle, curieuse.
- Changer d’air m’a fait du bien, voilà tout. Je monte rejoindre Bella ! lançai-je en guise de réponse. Elle me regarda perplexe, se demandant quelle mouche m’avait piqué. J’étais parti terrifié que Bella ne retrouve le cabot et voilà qu’à présent, j’en étais presque heureux. Elle trouvait cela très étrange mais ne chercha pas plus loin trop heureuse de conserver sa voiture. |